JOURNAL DU TREK La carte du TREK réalisée par BASTIEN: "cliquez" 1ER Jour POKARA - PHEDI - DHAMPUS - POTHANA 7 heures, nous sommes tous réveillés et levés sans problème. Je crois qu'il y a vraiment du plaisir à partir. Bonne nouvelle, Daniel n'a que 37°7 de température après les 39°4 d'hier soir, c'est rassurant sur les effets de l'Aspirine, mais lui qu'a-t-il eu ??? On ne sait pas ! Enfin, essayons de ne pas oublier les dernières petites choses qui traînent : brosses à dent, livres, walkman… Achat de beignets et de croissants au chocolat au petit magasin du coin, il faut le ventre bien plein pour partir. Nous retrouvons Robin, notre guide porteur à l'agence et voilà tout le monde file vers le bus. Robin a vingt ans, c'est un jeune homme bien costaud, bâti comme on peut l'attendre de quelqu'un qui a l'habitude de porter de lourdes charges. Son visage est lisse et carré, ses yeux très noirs tout comme ses cheveux, avec un beau sourire. Il parle un peu anglais, de quoi nous comprendre. Le bus est là, bus local bien déglingué avec un klaxon tous neuf cependant ; vert et bleu, enfin ce qu'il en reste car la peinture s'écaille de partout. Le chauffeur s'active, petit nettoyage et puis il sort la manivelle ; non ce n'est pas la 1ère panne, seulement il n'y a plus de démarreur ! Enorme nuage de fumée qui fait rire les enfants et le tuf-tuf s'ébranle ; il faudra encore 10 minutes avant de partir et quelques arrêts pour rejoindre la gare routière en ville. Le ciel est parfaitement dégagé et comme pour nous tenter encore un peu plus, pour nous confirmer que la montagne est belle, là devant nous, les neiges brillent au soleil, sur toute la longueur de la chaîne himalayenne. Daniel me rassure, le bus se nomme "l'intrépide" !
Robin s'inquiète du départ qui tarde vraiment, tranquilles les Népalais ! Un grand coup sur la tôle et c'est le signal, on peut partir. Daniel discute avec son voisin, un visage bien accueillant, il porte une toque népalaise, fond blanc et dessins rouges ; tous deux rient de bon cœur. Le long de la route, la vie s'agite comme un matin, une maman accompagne son enfant à l'arrêt de bus, où beaucoup de petits écoliers en uniforme attendent déjà. Une femme passe la balayette devant sa maison, un bébé se repose sur une paillasse au soleil, une jeune fille brosse ses longs cheveux, deux hommes scient des planches de bois, une jeune femme est installée pour filer la laine. Tout le monde est sorti des maisons trop fraîches et profite des premiers rayons qui chauffent déjà… Nous voilà à PHEDI, un thé bien chaud, un dernier coup d'œil sur la carte et c'est parti, il est 10 h 10.
Quand nous nous arrêtons, près d'un petit café, je prends le pouls de Daniel pour vérifier s'il a de la fièvre, alors plusieurs népalais me tendent leur poignet pour je fasse de même, instant bien rigolo ! Puis une jeune tibétaine me montre de suite un affreux bobo et me demande si j'ai des médicaments. Un peu plus loin, dans de grands arbres, nous croisons un petit groupe de singes aux longues queues, très beaux avec leur face noire cerclée de poils blancs. Ils sont excités par un gros chien et nous font toutes sortes de sauts et cabrioles en poussant leurs cris. Nous marchons un certain temps avec un tibétain, il nous accompagne jusqu'à DHAMPUS, portant quelques souvenirs qu'il va vendre dans les montagnes aux touristes de passage. Il fait la montée tous les jours à partir de POKARA. Son pays est occupé depuis 1959 par la Chine, ses parents ont quitté le Tibet en 1962 et lui-même est né au Népal. Maintenant, ils vivent dans un camp de réfugiés sur un terrain acheté par la Suisse. Il nous parle longuement des horreurs que les Chinois ont fait subir à son peuple. Premier arrêt à DHAMPUS à 12 h 30. Nous installons une grande table et deux bancs sur une terrasse en herbe, devant nous le Machhapuchhare et comme un prince, nous profitons de la vue en attendant les cinq Dal Bhat. L'air est un peu frais mais tellement pur.
Nous sommes presque arrivés et c'est alors qu'un porteur nous double, il a sur le dos deux énormes sacs à dos et son petit sac, tenus par une corde ; il est jeune et marche assez vite. Un peu après, suivent deux canadiennes et leur guide, chacun faisant son chemin… Une petite pause nous permet de faire connaissance. L'arrivée à Pothana se fait avec le soleil déclinant, les montagnes s'illuminent, c'est superbe. Elles paraissent si proches. Nous choisissons un lodge, vraiment pas cher, c'est la saison basse. Après une bonne douche (grâce aux panneaux solaires) on se réchauffe et on s'enfume autour d'un feu de bois. Le repas se prendra vers 18 h, le temps d'admirer le soleil couchant. Il fait froid, de plus en plus froid mais on sait que demain l'on marchera encore avec le soleil sur nos visages, regardant simplement les petites violettes et les feuilles tombées. Ce soir, le ciel est profond, immense et les montagnes comme des gardiennes d'éternité. Actuellement, elles rosissent et les faces enneigées prennent du relief, c'est magnifique ! les voilà saumonées…
Tout le monde se couvre de plus en plus car le froid devient mordant. Daniel, lui, sort de la douche, heureux et pimpant, sa fièvre semble rester un mauvais souvenir. Les écoles que nous avons croisées sont fermées, les petits écoliers ont rangé leurs uniformes, il leur reste un peu de temps pour jouer au milieu du chemin. Au loin, quelques tambours des montagnes rythment les aboiements des chiens, qui, comme partout sur la terre, prennent possession de la nuit.
2ème Jour POTHANA - TOLKA - LANDRUK
Nous revoyons le porteur aux deux sacs à dos. Il fait peine car cela semble vraiment lourd. Beaucoup de maisons se sont transformées en café, resto et des propositions de boissons, de gâteaux nous sont régulièrement faites, mais sans insister. 12 h 30, les Dal Bath se cuisinent ; Riz, soupe aux lentilles et légumes. C'est le plat vraiment traditionnel, servi à volonté, l'idéal pour les marcheurs, dévoreurs que nous sommes devenus.
Les petits bouts portent tous ici de gros bonnets de laine rouge, semblables à leurs joues et Robin est très fier de me monter le sien, tricoté par sa maman.
Pour manger, pas de problème : patate, riz, nouilles ou soupe : la même carte, les mêmes prix dans toute la vallée, fixés par le comité des lodges. Mais ce soir, on a découvert une nouveauté : le pain tibétain, grosse galette frite, plutôt bon, avec du sucre ou du miel, enfin c'est chaud et ça remplit bien. Dans la salle à manger, autour des grandes tables, les enfants font un peu de travail et Martin a prêté son livre d'anglais à deux jeunes enfants ; ils semblent contents et intéressés, en échange ils nous montrent un cahier d'exercices de mathématiques ; Robin nous questionne, pas de surprise, c'est partout pareil ! Dans ce village, sans groupe électrogène, nous soufflerons les bougies de bonne heure et serons couchés juste après le soleil.
3ème Jour LANDRUK - GHANDRUK La nuit fut longue et déjà les montagnes sont découvertes, les neiges brillent. Chacun est emmitouflé car nous sommes du côté de la vallée qui est encore à l'ombre. Aujourd'hui, 40 minutes de descente et 3 heures de montée : slowly, slowly… Le petit déjeuner aura son importance : œuf dur et pain tibétain ou porridge ; thé, café ou chocolat. Pas de chance ce matin, le porridge sent le pétrole et a un goût de métal. Enfin, on va se laver les dents à l'eau glaciale, on referme les sacs de couchage, on vérifie les sacs à dos et c'est reparti. Bientôt midi, nous avons froid plus de la moitié du trajet, une bonne descente vraiment pas facile, avec des marches en mauvais état et puis une longue et interminable montée. En chemin, les "namasté" rythment les rencontres, chacun joint les deux mains et baisse légèrement la tête. Les enfants vont nus pieds, en guenillons avec, presque toujours, le nez morveux et des petites blessures mal soignées. Nous faisons une pause près d'une petite maison, elle est toute de pierre et ouverte au soleil, avec une grande terrasse faite d'énormes pierres plates, un petit préau pour la table et les bancs, quelques marches vers une fontaine, et un peu plus loin, à côté d'une grange, un pilon à grain. Accolé à la maison, un long banc de pierre où je me suis installée. La fille et la mère de la maison sont assises juste à côté sur une paillasse, le visage en plein soleil ; la mamie se coiffe avec de grands gestes lents et précis, sa chevelure grise est très longue et les touffes de cheveux qu'elle enlève, elle les roule et les met entre ses orteils. Pourquoi faire ? Une jolie poule rousse, toute gonflée, comme si elle sortait d'un brushing, traverse la terrasse. Au milieu, un gros chien noir est étalé de tout son long. De la maison, juste au-dessus, nous parviennent les mélodies d'une petite radio, voix aiguës qui disparaissent sous les cocoricos des volailles. Comme la vie est paisible dans ces montagnes de l'Himalaya. 14 H 00, nous voilà à GHANDRUK, la montée était impressionnante et les petites haltes nécessaires. Les corps suivent plutôt bien, pas d'ampoules aux pieds, pas de mal de jambe, les articulations ne se plaignent pas non plus. Daniel et Bastien semblent s'être accommodés de leur sac à dos. En arrivant à GHANDRUK, nous avons été doublés par une petite troupe d'ânes qui montaient jusqu'au village, au son de leurs clochettes. Ils portaient quelques kilos de marchandise. Dans l'autre sens et retournant chez elle, après l'école, nous avons croisé une guirlande d'écolières jupes bleues plissées et chemisiers blancs "namasté, namasté" des petits rires enfantins résonnaient entre les bonjours. De la terrasse de la lodge, la vue sur les montagnes est parfaite et nous ne nous en lassons pas ; Daniel vient de rencontrer deux petits gars qui tirent sur les poules au moyen de lance-pierres, échange de sourire, de coup d'œil, il leur emprunte l'un des objets et vise un poteau de bois "bang", résonance de la pierre et étonnement des deux mômes qui en redemandent. Les nuages cachent partiellement les Annapurnas, les rendant encore plus mystérieux et imposants. Ce soir nous dormons au Milan Hôtel ! La nuit vient de tomber et nous nous réfugions dans la grande salle commune ou certains mangent, d'autres discutent, jouent aux échecs et où parfois des enfants travaillent. Martin et Garance ont en effet apporté quelques exercices à faire, le CNED ne saurait attendre… Sous l'immense table se trouve un chauffage au pétrole qui fait beaucoup de bien aux pieds. Pour garder et diffuser la chaleur, la table est entourée de couvertures tombant jusqu'au sol. Autrefois, au même endroit il y avait un trou dans le sol où l'on déposait des braises ; cela enfumait la pièce mais la réchauffait également. Après les cours, nous tardons un peu car les enfants veulent faire quelques parties de cartes, ici l'ambiance est chaleureuse. Demain, nous allons marcher pour le 4ème jour et tout le monde semble content, le Machhapuchharé nous appelle et de chaque pas nous nous en approchons. Demain nous allons marcher et je vais essayer en marchant de ne rien faire d'autres que de marcher… 4ème Jour GHANDRUK - CHOMRONG Ce large chemin monte et descend en douceur, de quoi se mettre en jambe et "en bouche" également, car les enfants ont commencé la journée, très bavards, en se racontant toutes sortes d'histoires de yetis et de yaks. Le soleil est là, comme tous les jours et c'est bien ce dont la nature a besoin pour être encore plus belle ! Nous avançons dans la vallée vers KIMRONG et le trajet est de plus en plus glissant. Martin et Garance nous ont fait quelques démonstrations, enfin pas gros bobos. Midi arrive et nous voilà déjà autour de la table à attendre le Dal Bhat, chacun s'occupe ou se repose, mais le silence est de mise. Nous re-filtrons un peu d'eau avant de partir. En ce moment il n'y a guère de touristes et c'est bien ainsi, on se sent plus seul, au bout du monde, enfin un tout petit peu… La marche de l'après-midi aura été assez longue et parfois dans la poussière ; nous nous sommes laissés distraire par des biquettes blanches et noires qui broutaient entre les bambous Bastien marche devant, il va vite ; nous le retrouvons juste avant CHOMRONG, installé à regarder, avec les jumelles, un impressionnant ballet : une dizaine d'aigles planant, dessinant de grands cercles dans le vide, juste au-dessus de nos têtes. Ce soir c'est Robin qui choisit le lodge, car dans celui-ci il y a la télé et la patronne est presque une grande sœur = une "friend didi". Il est très agréable et presque trop serviable. Au moment du repas, il nous étonne en mangeant si vite et si habilement son Dal Bhat avec les doigts. Autour de la table, éclairée par quatre ampoules, nous discutons avec des australiens qui reviennent du camp de base de l'Annapurna. Nous les assommons de questions : "Y a-t-il de la neige ? Fait-il froid la nuit ? Comment sont les chemins, les risques d'avalanche et la durée des trajets ??? Nous sommes tous très motivés pour y aller, car il y a peu de neige cet hiver, et c'est sans doute un endroit magnifique.
5ème Jour CHOMRONG - BAMBOO
Programme de la journée, quatre heures pour rejoindre BAMBOO ; encore du temps pour être avec nos pieds, en bon ami. Ressentir nos appuis, penser à la terre, cette grosse boule qui nous porte et nous supporte, qui nous aime et à qui nous ne le rendons pas toujours. Force, tant de force en elle qui peut grandir en nous ! Quand le rythme de la marche est lent, voir très lent, car la pente est raide, c'est dans un autre monde que l'on pénètre ; celui d'une apesanteur légère qui enveloppe chaque cellule de notre corps, la présence de soi et du temps est immense et captivante. Ce n'est que conscience pure et vraie, mouvement primaire, mouvement plaisir de la marche, tout le corps y concourt et l'esprit y pénètre petit à petit, s'y noie pour oublier l'autre réalité. Profondeur des sens, calme du souffle, régularité du cœur jusqu'au moment où le pied s'accroche sur un cailloux, un papillon vous distrait, quelqu'un parle… Le matin, nous avons entamé une longue montée, tous ensemble, d'un assez bon rythme, silencieux, les pas s'emboîtant les uns dans les autres, comme une belle cordée d'alpinistes.
En fait de pause, nous avons enchaîné la marche et il est déjà 13 heures quand nous arrivons à BAMBOO. Je suis assise le dos au soleil, face aux pics enneigés des Annapurnas. La dernière ligne droite avant le camp de base : le pied des montagnes.
Il y a peu d'habitations maintenant et les chemins sont moins aménagés, mais on rencontre toujours quelques népalais qui vont un peu plus loin, chargés de leur fardeau. Ce matin nous avons croisé des "hommes arbres" ils portaient d'énormes touffes de feuilles de bambous et de dos nous ne voyons que deux pieds qui marchaient sous un feuillage vert. Robin est bien épuisé mais ce n'est pas le cas de tous les porteurs et ceux qui rapportent aux villages les cannettes de coca cola, la lessive, les légumes etc… sont souvent chaussés de tongues. Le brouillard arrive de partout et voilà les sommets qui disparaissent, le vent semble bien fort tout en haut. En venant, nous avons vu beaucoup d'oiseaux, assez petits mais avec de superbes plumages, rouge, bleu; vert… Il faut dire que le Nepal dénombre plus de 800 variétés d'oiseaux, plus que le Canada ou les Etats-Unis. Cela est lié à la diversité topographique du pays passant du niveau de la mer à plus de 8800 mètres d'altitude et où parfois moins de 100 km séparent les plaines tropicales des neiges éternelles! L'après-midi se termine autour de la table chauffante, nous partageons nos impressions avec deux français qui finissent leur Trek. Discussion très sympathique.
De vieux arbres, immenses, tordus, couverts de mousse et ressemblant à des barbus ou pendaient de partout de grosses touffes de lichen. La forêt est humide et sombre et il y règne une atmosphère étrange ; on s'attend à y entendre quelques grognements ou grincements effrayants, de quoi sentir, monter en soi, les vieilles peurs de son enfance. Le lavage des dents avant le coucher, se fait à la fontaine sous un ciel éblouissant d'étoiles, juste ce qu'il faut pour nous propulser dans de merveilleux rêves. 6ème Jour BAMBOO - DEURALI Réveil avec les premières gelées, nous sommes à 2400 m, il faut donc sortir les gants et les bonnets de laine. La salle commune est déjà chauffée et les orteils acceptent à peine de pianoter serrés qu'ils sont dans les grosses chaussettes et chaussures. Les visages sont encore endormis et certains sembles tristes ou rêveurs. Qu'en est-t-il de la vie ici, dans ce minuscule village ? Une quinzaine d'habitants réside autour de quatre lodges. L'hiver est long et le népalais qui tient dans ses mains une petite radio, d'où crépitent des chansons nasillardes, semble s'accrocher ainsi au reste du monde. Le petit déjeuner nous ravigote et nous prépare pour notre marche matinale, le froid est ici beaucoup plus présent, et il va falloir être prudent pour ne pas glisser sur le verglas. DOUCEMENT, SLOWLY, 13 heures, nous sommes à HIMALAYA Hôtel and Restaurant. La montée a été assez longue : 3 h 30, pas vraiment difficile et pourtant une étrange fatigue était au rendez-vous, assez profonde et qu'il a fallu apprivoiser. Le chemin était très escarpé, de multiples pierres et de grosses racines toutes tordues, rendaient l'ensemble chaotique et parfois périlleux. Nous avons aussi marché un certain temps dans un petit ruisseau, sur un lit de gravier ; puis le chemin s'est transformé en un long tapis de feuilles mortes semblables à celui de nos forêts. Le givre décorait le tout de multiples cristaux brillants au soleil. Avec Garance, nous avons puisé dans notre répertoire quelques chansonnettes de quoi nous redonner un peu de rythme quand cela manquait. Puis Garance a eu l'idée de réciter des tables de multiplications, pourquoi pas ! A la moitié du trajet, nous avons surpris un couple de singes, pas frileux pour le moins, ils ont déguerpi à notre vue dans de rapides bonds en contre bas.
Nous nous sommes arrêtés plusieurs fois, pour profiter des vues plongeantes (200 m environ) sur les eaux turquoises. Leur brouhaha est constant et nous renvoie au doux souvenir de l'Atlantique.
Aujourd'hui la pause se sera faite autour de bols de soupe aux nouilles et de quelques jeux de carte, "bataille corse" ou "quems", de quoi laisser éclater de bons rires d'enfants. L'après-midi se termine avec un vent froid qui s'engouffre dans la vallée de plus en plus étroite. Les montagnes paraissent gigantesques et la végétation disparaissant, il ne reste que la roche ; plusieurs cascades tombent à pic sur des tapis de glace, c'est magnifique ! L'arrivée est lente avec beaucoup de fatigue, mais les enfants sont si contents de trouver les premières traces de neige. Une petite sieste s'impose avant le repas du soir. Nous nous installons dans un tout petit dortoir de six lits où nous déposons nos duvets et les grosses couvertures de laine sous lesquelles on ne peut plus bouger. DEURALI, la nuit est calme, il n'y a presque personne, dernière marche pour atteindre enfin le Machhapuchharé. 7ème Jour DEURALI - MBC : Machhapuchharé Base Camp Ce matin, quelques petits flocons de neige tombent et le ciel est nuageux. Ce n'est pas bon signe car s'il fait trop froid il y aura de la glace et le chemin sera dangereux voir impraticable. Après une mini toilette, on rentre les mains gelées, le chauffage fait un bruit d'enfer mais il est plus que nécessaire car la température atteint - 5°. Le tibétain bread se préparent et cela sent bon dans la cuisine ; ici le cuisinier est adorable, il plaisante sans cesse, adore les français et connaît deux phrases : "comment ça va ? Comme-ci comme ça !" qu'il nous répète en chantonnant. Sa cuisine est très bonne et le lieu chaleureux. Tout le monde semble content de partir même si les problèmes météo nous tracassent un peu. Nous nous couvrons du mieux qu'on peut et nous y allons. Quatre heures de marche, un souvenir inoubliable qui s'est inscrit dans nos mémoires. De toutes petites boules de neige ne fondant pas se déposent un peu partout comme pour décorer le paysage. Le brouillard semble fermer la vallée derrière nous et nous pousser vers l'avant tout en haut là-bas, le soleil brille. La joie est dans les cœurs, les lèvres sont sèches, les joues chaudes, les bonnets tout blancs ; on monte sans problème, pas de glace, c'est un régal… Arrivé en premier, Bastien comme toujours, en deuxième Robin, dès qu'il a déposé son sac, il revient chercher Garance et la porte sur son dos jusqu'au bout. Il est tout content. En haut nous crions "Hourra !,rien d'original, juste un énorme plaisir. Il est 13 heures, nous sommes à Machhapuchharé Base Camp. La neige tombe depuis DEURALI, elle s'est intensifiée et maintenant tout est blanc, de plus en plus blanc, les enfants adorent. Il neige sans discontinuer de beaux gros flocons et pas un seul sommet ne veut montrer son nez. Je ne peux m'empêcher d'être inquiète en pensant au retour dès demain. Pour ce soir, pas question d'aller jusqu'au camp de base des Annapurnas. Ma gorge se serre, émotion, crainte ; en même temps c'est absolument magnifique cette neige qui n'arrête pas de tomber, tout devient de plus en plus immaculé. Une guirlande de stalactites se détachent du toit. Marin a pris une pelle pour déblayer le chemin, Bastien et Garance font une bataille de boules de neige ; ils sont heureux ! Un jeune anglais arrive au lodge, il semble frigorifié et nous dit qu'il neige depuis Bamboo. Juste derrière lui suit un couple de Hong- Kongais, ils sont adorables, tout souriant et super équipés. Tous sont recouverts de neige et bien contents de venir au chaud. Les Hong-Kongais vont faire leurs photos souvenirs, pose sous la neige, seul puis en couple, avec les lunettes, sans le bonnet, on rigole tous et Bob, l'anglais punky se réchauffe devant son bol de céréales. Voilà un autre anglais et son guide qui arrivent, ils semblent épuisés et nous disent avoir abandonné la montée à l' ABC : trop de neige ; ils avaient perdu le sentier, sont tombés, ont glissé une vingtaine de fois. Déjà deux heures que nous sommes là, la neige tombe intensément, ça promet. La soirée se passe à discuter et à deviner toute sorte de jeu d'allumettes et de tours de carte. On se sent bien, on rigole, même si de temps en temps on vérifie la neige et le vent dehors. Le sommeil nous appelle, demain il faudra marcher.
8ème Jour MBC - DEURALI La nuit dernière a été difficile et nous n'avons pas bien dormi, est-ce le froid ou l'altitude ?
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Bob est déjà parti vers le camp de base des Annapurnas, les Hong-Kongais hésitent ; nous ne prendrons pas le risque de monter plus haut, c'est trop verglacé et nous n'avons pas de bonnes chaussures. Photos souvenirs devant les sommets et c'est le début de la descente. Les orteils sont gelés, les doigts pas vraiment mieux et le vent glacial. Dans les dix premières minutes Garance est en larmes, ça glisse, il fait froid, alors on discute, on la câline, on l'encourage et c'est reparti. 3 h 30 dans un décor hallucinant, la neige épaisse partout si pure et silencieuse, brillante au soleil, magique sur les bamboos et les rochers du torrent. Nous nous arrêtons pour quelques photos, personne alentours, un espace lumineux , vierge, tel un décor de théâtre, tout s'immobilise.
Nous n'avançons que très lentement, les articulations sont raides, les doigts crispés ; le chemin est souvent limite et nous tenons par la main pour descendre en crabe. Je crois que tout le monde a eu l'occasion de glisser et de tomber, mais personne ne s'est fait mal. On entend parfois les chutes de glaces venant des cascades gelées, ce n'est pas rassurant. Enfin la beauté prend le dessus et c'est du bonheur qui nous envahit, on chante, on rit et on rouspète un peu Martin qui fait le fou sur la glace. 14 h 30 nous arrivons à DEURALI et retrouvons avec plaisir le cuisinier du dream lodge : Hasta Rai, ilnous offre a big teapot que nous ne refusons pas. La salle commune se remplit petit à petit et nous nous retrouvons à six nationalités différentes autour de la table, c'est agréable et sympathique. Beaucoup viennent de la vallée et nous donnons des nouvelles enneigées des camps de base. Les échanges vont bon train, surtout avec trois français voyageurs de longues dates. Bob arrive, le sourire aux oreilles, il avale une soupe et un pain tibétain et repart, objectif CHAMRONG, quel fou ! Garance fait connaissance avec une coréenne vivant au Canada : Jessica ; elle lui apprendra un jeu de carte : le Go Fish. La soirée passe vite et nous regagnons notre chambre, les lits y sont gelés comme les images dans nos têtes.
9ème Jour DEURALI - BAMBOO - SINUWA
En chemin, nous rencontrons Nelly et Olivier, deux Nantais très sympa. On prend notre temps et on mange ensemble à Bamboo. On traîne, on discute, on se raconte et il est déjà 16 heures quand on repart pour Sinuwa. Il faut bien deux heures de marche encore, ne traînons pas. Le chemin est très agréable, on y reconnaît des passages de la montée. Les genoux tiennent bon bien que nous ayons déjà descendu trois heures le matin. Chemin faisant, la nuit venant, les arbres deviennent de plus en plus sombres, la brume plus grise et les pas s'accélèrent. Arrivant à Sinuwa, pas de Robin ni de Bastien… Ils étaient loin devant. Que s'est-il passé ? Question à la népalaise qui nous accueille, pas de réponse. Petite panique, enfin voilà Robin qui arrive sans son sac à dos ! Bastien et lui sont déjà installés dans un autre lodge à trente minutes plus loin, Robin va le retrouver, nous, nous décidons de ne pas descendre car la nuit est pratiquement là. Nous passons la soirée avec Nelly et Olivier, à refaire notre voyage et eux à nous raconter l'Inde d'où ils viennent.
10ème Jour SINUWA - CHOMRONG - HOT SPRING
On retrouve Bob en pleine forme et nous partons avec comme "but" les HOT SPRING : sources d'eau chaude un peu plus bas, espoir de petit shampoing, rêve de gros savonnage, de trempage et de détente. Les derniers kilomètres sont difficiles et semblent interminables. Ce soir : nous sommes propres et c'est bon, comme c'est bon d'être propre ! Les sources d'eau chaude étaient superbes, deux petits bassins au bord du torrent, coincé entre de hautes montagnes, avec plein de petits enfants qui s'amusaient, criaient et sautaient dans l'eau : "namasté" et sourires, au revoir et signe de main. De nouvelles rencontres pour le repas du soir, deux charmants Hong-Kongais, grands voyageurs et une tibétaine réfugiée à Pokara et qui vend de l'artisanat aux touristes. La chinoise se nomme "nuage rouge dans le ciel en soirée" et la tibétaine : Sangmo ce qui signifie "gentillesse". Voilà beaucoup de délicatesse et de poésie autour de ces deux femmes au destin si différent.
11ème Jour HOT SPRING - SYAULA BAZAR C'est bientôt la fin du trek, réveil à 9 heures après une très bonne nuit, Hot Spring oblige. Le thé est brûlant, nous achetons quelques objets à Sangmo et on se sépare après un échange de nos adresses. A bientôt. Quelques heures de marche tranquille pour aujourd'hui, une dernière nuit et c'est Pokara.
La température remonte, voilà des bananiers et des cactus, il faut dire que nous sommes à la même latitude que le Maroc Ce soir nous dormons dans un petit lodge à Syaula Bazar très sommaire, on cueille quelques mandarines dans un arbre du jardin. La soirée se passe à la lampe à pétrole, dans une drôle d'ambiance, nous sommes dehors et il fait quand même froid.
12ème Jour SYAULA BAZAR - NAYAPUL
Dernier matin, les coqs chantent, aussi fiers ici qu'ailleurs. Une femme épluche des épis de maïs, deux petits gars jouent au foot avec une drôle de balle faite d'une boule d'élastiques. La vue est plongeante sur les toits des maisons et en bas un gros troupeau de moutons avec la petite tente du berger. Nous partons de bonne heure ; dernières foulées, étrange sensation, désir de ne rien oublier, quelques belles images s'accrochent encore à nous, des odeurs des sons… Pas trop vite, pas déjà, profitons jusqu'au bout du chemin. L'air frais est si bon, mais le soleil tout doucement perce les petites brumes matinales; le goût du thé aux épices est encore présent. "Je souhaite revenir une autre fois ici et faire le tour de l'Annapurna". Voilà c'est dit et ainsi c'est plus facile de partir, de quitter. Je suis très heureuse et très triste. 15 heures nous arrivons à Pokhara.
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